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Varian Fry à Marseille
par Pierre Sauvage

 

En 1941 à Marseille, un jeune Américain écrit à sa femme à New York. Il s’émerveille des contacts qu’il est amené à avoir avec beaucoup des plus grands auteurs et artistes de l’Europe, ainsi qu’avec des hommes politiques éminents. “L’Europe est devenue bien étrange,” écrit-il, “quand des hommes tels que ceux-là son réduits à attendre patiemment dans l’antichambre d’un jeune Américain sans importance aucune.”

L’homme en question porte le nom peu commun de Varian Fry. Il a 32 ans quand il débarque à Marseille le 14 août 1940, deux mois après la défaite de la France et un an et demi avant que les États-unis ne se laissent enfin entraînés dans la guerre.

Alors qu’il était étudiant à l’université de Harvard, Fry avait donné une forme tangible à son amour pour les arts en fondant avec un ami une bouillonnante revue intellectuelle d’avant-garde.  Dans les années trente, à New York, il collabore surtout à de petites revues politiques, fréquentant les milieux libéraux anti-isolationnistes et se faisant des amis parmi les exilés antinazis.

Un voyage en Allemagne le marque, comme le raconta Mary Jayne Gold dans ses savoureuses mémoires de cette époque, Marseille Année 40, parues aux Éditions Phébus. L’héritière américaine, qui participa à sa façon à l’expédition Fry, évoquait toujours la voix tendue avec laquelle Fry lui avait raconté à Marseille le pogrom auquel il avait assisté en 1935 à Berlin.

Dans un café en plein centre de la ville, deux jeunes nazis s’étaient approchés d’un homme qui avait vaguement l’air juif et qui buvait tranquillement sa consommation. Alors qu’il tendait la main vers son bock, l’homme la trouva soudain clouée à la table par un coup de poignard joyeux et triomphant d’un des nazis.

Lorsqu’il arrive à la gare Saint-Charles cinq ans plus tard, Varian a pris un mois de congé de son travail, qui consistait alors à écrire des analyses de politique étrangère. Il ne s’agissait plus seulement d’analyser. Lui et d’autres Américains avaient relevé la clause déshonorante de la convention d’armistice avec l’Allemagne (la “paix dans l’honneur” du maréchal Pétain, approuvée par les Français), par laquelle la France avait accepté de “livrer sur demande” les ressortissants du Grand Reich que l’Allemagne réclamerait.

Mandaté par la toute nouvelle et petite association américaine privée qui s’était rapidement constituée sous le nom de “ Emergency Rescue Committee ” (Comité de Sauvetage d’Urgence), le jeune intellectuel prend l’hydravion à New York, muni de listes de personnes en danger ou qui pourraient l’être rapidement. Il y a beaucoup de noms d’artistes et d’intellectuels dans ces listes, mais aussi beaucoup de noms de membres d’un groupuscule socialiste de gauche, Neu Beginnen. Au départ, en effet, l’opération avait été en grande partie politique. Le représentant de cette faction controversée craignait que l’aide alors en cours pour les réfugiés allemands en France n’exclue ses amis. A New York, on ne pardonnera jamais à Varian Fry la façon dont, de son propre chef, il élargira sa mission.

Le mois de congé passé, il ne sera pas question pour Fry de rentrer — ni les mois suivants. Varian Fry se rend rapidement compte qu’il a une tâche importante devant lui, un rôle essentiel à jouer, une action à accomplir.

Fry n’a pourtant ni l’allure ni le tempérament d'un agent secret. Généralement tiré à quatre épingles, il se passionne pour le latin et le grec — et les oiseaux. Il n’a certainement pas d’expérience directement pertinente pour ce genre de mission, et il se reprochera, une fois rentré, d’avoir commis bon nombre d’erreurs.

Son entreprise, commencée dans une chambre — et la salle de bains — de l’hôtel Splendide, Boulevard d’Athènes, déménagera ensuite au 60, rue Grignan — une plaque y fut apposée en mai 2004 grâce aux efforts de l'Association Varian Fry France — puis en janvier 1941, au 18, boulevard Garibaldi. Un grand drapeau américain présidera aux activités de ce qui a été baptisé le Centre américain de secours et dont les activités officielles, avouables, consistent à aider, de façon parfaitement légitime, des réfugiés voulant se rendre aux États-unis.

Fry crée une équipe qui ne cessera de croître durant son séjour. Parmi ses premiers associés, d’autres Américains qui se dévouent: Miriam Davenport Ebel, étudiante en art, qui se préoccupait déjà, à Toulouse puis à Marseille, du sort des réfugiés, Mary Jayne Gold, belle héritière tiraillée entre sa participation à la mission Fry et sa liaison avec un jeune truand marseillais; le futur acteur Charles Fawcett, serviteur intrépide de bien des causes humanitaires; le mystérieux Leon Ball, qui a disparu sans laisser de traces. Des Français se joindront à eux: notamment Daniel Bénédite (l’allié essentiel à la fin), Jean Gemähling, grand Résistant décédé en 2004, Jacques Weisslitz et Charles Wolff (les deux derniers juifs français qu’on ne réussit pas à faire partir et qui moururent l’un déporté et l’autre sous les coups de la Milice).

Des réfugiés contribueront aussi de façon essentielle à la survie d'autres réfugiés, avant de se sauver eux-mêmes lorsqu’ils le pourront ou qu’il le faudra: Albert Hirschman (l’allié essentiel au départ), Franz von Hildebrand, Marcel Verzeano, Lena Fishman, Anna Gruss, Heinz-Ernst Oppenheimer, Justus Rosenberg, et bien d’autres. D’autres encore sans précisément faire partie de l’équipe du C.A.S. seront non moins essentiels: Hans et Lisa Fittko, qui créeront et géreront une filière importante dans les Pyrénées; Bil Spira, qui avant de survivre Auschwitz sera le principal faussaire du groupe.

Fry se rend compte qu’il travaille bien sous pression, qu’il sait mentir avec aplomb, qu’il n’a pas peur de faire tout ce que la situation exige. Travailler dans l’illégalité dans ces circonstances ne lui pose pas le moindre cas de conscience. Dans sa détermination, Fry se mettra à dos certaines des organisations de bienfaisance américaines qui travaillent en France et qui évitent soigneusement d’offusquer Vichy. Le C.A.S. se verra même banni du Comité de Nîmes qui regroupe les organisations humanitaires.

Après la guerre, Fry analysera pour un ami (devenu le grand économiste Albert Hirschman) ce qui lui avait permis d’être efficace à Marseille : Il faut, écrit-il, une bonne dose de cynisme et d’ironie pour s’occuper professionnellement des misères humaines”, il faut aussi de l’idéalisme (qui s’amenuise pourtant avec le temps), un peu de naïveté — et surtout ce qu’il appelle une simple “ orneriness ”. C’est difficile à traduire, mais c’est important. Quelqu'un qui est “ ornery ” (l’adjectif) est difficile à manier, se braque facilement. Pour dire les choses telles qu’elles sont, c’est souvent ce que nous appelons en bon français un emmerdeur.

Voilà: nous parlons d’une époque où il ne fallait pas être accommodant, et un homme s’est présenté qui était incapable de l’être. Il ne supportait pas les imbéciles — intellectuels ou moraux — et même lorsque l’enjeu était dérisoire, Varian Fry avait l’habitude de s’entêter, de revenir constamment à la charge. Or à Marseille, en 1940-41, l’enjeu n’était pas dérisoire.

Varian saisit rapidement aussi que son rôle est parfois celui d’un médecin pendant une épidémie: il ne faut jamais oublier de rassurer. “ See you in New York, ” — A bientôt à New York — dira-t-il, comme si de rien n’était, à des réfugiés traumatisés sur le point de s’embarquer sur la filière des Pyrénées.

Fry travaille beaucoup mais pas sans relâche. Il trouve le temps d’écrire un nombre considérable de lettres parfois extraordinaires sur sa vie à Marseille et sur sa propre transformation pendant cette période. Il se plaît bien en France, malgré les difficultés croissantes de la vie sous l’Occupation. La Provence le ravit: comment de telles horreurs, se demandait-il,  peuvent-elles avoir lieu dans un paysage aussi béni?

Il se sent assurément plus proche des réfugies compliqués de l’intelligentsia européenne que des fonctionnaires bornés et xénophobes du consulat américain (sauf le bon Hiram Bingham, Jr., bientôt muté ailleurs). Les rapports avec “la maison mère” à New York se détériorent constamment, et Fry finit par proclamer avec insistance que son Centre est un organisme parfaitement indépendant qui ne reçoit d’ordres de personne. Vers la fin, tout le monde — sauf ses collègues et les réfugiés ! — veut qu’il rentre chez lui: Le Département d’État américain, qui fait pression sur l’Emergency Rescue Committee à New York; la police de Vichy, qui savait sûrement ce qu’il faisait et qui n’aimait surtout pas les trotskistes ou anciens trotskistes qui faisaient partie de son entourage; et peut-être surtout les fonctionnaires du consulat américain à Marseille qui le détestent et ne voient en lui qu’un “ trouble-maker “ — un semeur de pagaille.

Mais même lorsque les Américains refusent de renouveler et de lui rendre son passeport, il s’entête. “ Ce travail est comme la mort—irréversible. Nous avons commencé ici quelque chose que nous ne pouvons pas arrêter. Nous avons permis à des centaines de personnes de se raccrocher à nous. Nous ne pouvons pas dire tout d'un coup qu'en définitive la tâche nous ennuie et que nous rentrons. ”

Vichy mit longtemps à l’expulser. Cette expulsion est-elle en rapport avec l’entretien que le chef de la police de Marseille eut avec le Consul Général des États-unis dans cette ville? Selon le policier, le consul américain n’a pas hésité à lui demander “de me débarrasser” de Fry… Fry n’oubliera jamais le reproche que l’intendant de police Maurice de Rodellec du Porzic lui fera en personne: “d’avoir trop protégé les Juifs et les antinazis.”

Lorsque son train partira de Cerbère, plusieurs membres de son équipe seront sur le quai de la gare pour dire au revoir à Varian Fry. “ Je fus très triste de vous quitter, vous et tous mes amis ”, écrira-t-il plus tard au gardien de nuit du C.A.S., “ plus triste peut-être que vous à me voir partir. Car je perdais tous mes amis en m’en allant, tandis que vous n’en perdiez qu’un seul. 

De retour à New York, Fry essaie sans succès de sensibiliser l’opinion publique américaine à la crise en Europe et au “ massacre des Juifs ” (titre de son article de couverture de la revue The New Republic en décembre 1942). Il est évincé de l’Emergency Rescue Committee, qui ne sera plus soutenu et sera absorbé par une autre organisation, qui deviendra l’actuel International Rescue Committee.

La lecture des lettres de Fry, ainsi que les articles qu’il écrira à son retour à New York, font regretter que lorsqu’il publia ses mémoires de sa mission en France, Surrender on Demand, parue enfin en France en 1999 aux Éditions Plon sous le titre La Liste noire, il ait dû se plier aux exigences de son éditeur de 1945, qui savait que l’opinion publique américaine n’était pas disposée à entendre les griefs que Fry voulait émettre sur la politique américaine à l’égard des réfugiés et sa “honte” de citoyen américain devant cette politique. Malgré concessions et coupures, et malgré de bonnes critiques, le livre ne se vend pas. La version française de ces mémoires, “La liste noire”, parue enfin en France en 1999, eut le grand mérite de remettre à sa place l’introduction bouleversante et accablante qu’il destinait au livre. (Dans les papiers de Fry, ce texte se trouvait dans une chemise marquée de sa main “Suppressed Material”—Censuré.)

“ Si j’ai le moindre regret à propos du travail que nous avons fait, c’est que c’était si peu, ” avait-il voulu dire en conclusion. “ Au total, nous avons sauvé quelques deux mille personnes. Nous aurions dû en sauver bien davantage, mais nous avons fait ce que nous avons pu. ”

A Marseille, le fidèle Daniel Bénédite et ses collègues — aidés par un jeune avocat du nom de Gaston Defferre — essaieront de leur mieux de continuer le travail du Centre américain de secours, jusqu’à sa fermeture par Vichy en juin, qui sera suivie du constat officiel de “ nullité ” de l’organisation en novembre. Bénédite et Gemähling entreront dans la Résistance, ou hélas les patriotes seront peu encouragés à se préoccuper du sort des réfugiés et des Juifs.

Le mariage de Fry s’était effiloché au cours de son année à Marseille, et son ex-femme mourra en 1948. Il se remariera avec Annette Riley en 1950, aura trois enfants, et cherchera toute sa vie, avec des succès intermittents, à gagner sa vie, parfois dans des métiers inattendus pour un tel homme, telle la publicité télévisée et la promotion de Coca-Cola… Son deuxième mariage ne fut pas non plus sans problèmes. Un divorce sera rapidement suivi par un début de réconciliation, alors qu’il commence à enseigner le latin dans une école secondaire à la campagne. Quelques jours plus tard, il meurt le 12 septembre 1967 à l’âge de 59 ans. Cet homme qui avait tant fait pour les artistes a quitté ce monde dans une maison qui lui avait été prêtée par... l’artiste Louise Bourgeois et son mari.

Mais la question se pose: comment justifier le fait que Varian Fry se soit intéressé en priorité aux “ vedettes ” du monde artistique et politique? S’il est vrai que cette mission a fini par englober bon nombre de réfugiés anonymes, doit-on néanmoins lui reprocher son élitisme? Un artiste médiocre a-t-il moins droit à la vie qu’un grand? En effet, s’il y a ceux que le C.A.S. n’a simplement pas pu faire partir, malgré ses efforts, il y en a bien d’autres dont le comité a tout bonnement rejeté la candidature, considérant qu’ils ne rentraient pas dans son mandat. L’auteur de l’auteur de ces lignes, par exemple, Léo Sauvage né Smotriez, jeune intellectuel juif sans piston, aurait-il dû, avec sa femme Barbara, juive polonaise, née Suchowolska, recevoir l’aide qu’ils ont sollicitée et n’ont pas reçue du Centre américain de secours? (Au lieu de partir, le jeune journaliste finit par participer à la grande vie culturelle de Marseille à l'époque en fondant une troupe de théâtre, Les Compagnons de la Basoche, tandis que sa femme se joignait aux intellectuels qui oeuvraient à la légendaire coopérative Croque-Fruits. Après l’occupation de la zone sud, Léo Sauvage trouva un refuge pour lui et pour sa femme enceinte dans un havre protestant au bord des Cévennes, Le Chambon-sur-Lignon, qui lui eut pour principe de ne fermer sa porte à personne.)

Avons-nous donc tort d’être émerveillés par le fait que le Centre américain de secours a contribué à la survie de Marc Chagall, Heinrich Mann, Max Ernst, André Breton, Franz Werfel, André Masson, Victor Serge, Jacques Lipchitz, Marcel Duchamp, Jean Malaquais, Lion Feuchtwanger et bien d’autres “ grands ” de la culture du siècle dernier.

Dans Varian Fry à Marseille, un long-métrage documentaire en cours, Karel Sternberg, réfugié tchèque qui a travaillé au C.A.S., donne une première réponse: on mesure une action par ce qui a été accompli — non par ce qui n’a pas été accompli. Il n’est jamais possible de tout faire, et il faut être réaliste en sauvetage: seul un nombre limité de personnes peuvent prendre place sur un radeau. De plus, certaines des personnalités auxquelles Fry s’est intéressé étaient particulièrement vulnérables du fait même de leur célébrité — laquelle constituait un avantage pour obtenir le visa américain, mais encore fallait-il trouver le moyen de faire sortir ces célébrités de France.

Mais peut-être faut-il surtout rappeler que si Varian Fry avait une grande conscience politique, c’était aussi quelqu’un qui aimait profondément les arts et la culture. N’est-il pas légitime de commencer par sauver ceux qu’on aime? C’est ce que veut notamment la tradition juive, et Varian Fry deviendra après sa mort le premier américain — le seul à ce jour — à être honoré comme Juste Parmi les Nations par le mémorial de la Shoah à Jérusalem, Yad Vashem.

Alors que toute sa vie il ne s’était guère vanté de ses prouesses en France en 1940-41, peu avant sa mort ce grand francophile s’était décidé à solliciter des honneurs français. L’affaire avait traîné jusqu’au moment où elle avait enfin été évoquée devant le ministre de la Culture. André Malraux, qui s’était rendu au C.A.S. en 1941, refusant de partir mais confiant à Fry les bobines de son film Sierra de Terruel (L’Espoir), qui risquait lui aussi de ne pas survivre. La croix de Chevalier de la Légion d’Honneur fut le seul honneur rendu à Varian Fry de son vivant.

À un moment donné à Marseille, en 1940, Varian Fry avait envoyé à sa mère une de ces hideuses cartes postales coloriées de l’époque en s’excusant et en expliquant qu’il l’avait achetée à un mutilé de ’40 qui avait boité de table en table vendant ses cartes postales au restaurant où Fry dînait avec des amis. Il commente : “ L’indifférence avec laquelle les être humains traitent les héros de hier me scandalise toujours. ”

Lors du service funèbre, le sculpteur Jacques Lipchitz, qui lui resta toujours dévoué — contrairement à bien d’autres parmi ceux à qui Fry et ses amis étaient venu en aide — leva les yeux vers le ciel et s’adressa directement à Varian Fry, cherchant à lui exprimer tout ce qu’il avait représenté pour “ nous tous ”. A des moments clés de l’histoire, résumera-t-il, il arrive que des individus surgissent avec précisément les qualités requises par la situation. Devant les exigences de la vie ordinaire, dira-t-il, “ Varian Fry était comme un cheval de course attelé à un chariot rempli de pierres. ”

Fry lui-même avait mis dans ses papiers en 1943 et conservé toute sa vie une citation qui lui avait plu, du grand chantre américain du potentiel humain, Ralph Waldo Emerson: “ There are men for whom a crisis comes graceful and beloved as a bride ” — “ Il y a des hommes pour qui une crise a l'allure gracieuse et aimée d'une mariée. ”


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Pierre Sauvage est le président du Varian Fry Institute ainsi que de la Fondation Chambon (USA).  Il est le réalisateur du documentaire Les armes de l’esprit (1989) sur l’action d’accueil de la région du Chambon-sur-Lignon où il est né sous l’Occupation.  Son nouveau long-métrage, Varian Fry à Marseille, sortira un jour.

© Varian Fry Institute, 1999-2008.

And Crown Thy Good: Varian Fry in Marseille (en anglais)


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